Old Up – La Reine Blanche

Old Up à La Reine Blanche : Tessa Volkine, épatante. Une plongée ultra réaliste dans l’univers des EHPAD où résidents et personnel sont écrasés entre intérêt des financiers et grincements des familles, où persiste un fil d’humanité. Où on ne peut vouloir aller.

Sur la scène, un rectangle de lino, une chaise en plastique blanc cassé. Annie Primevère arrive. Quatorze résidents en quatre heures…

C’est le matin, Petit déjeuner, toilette, changer. Vêtements et protections. Une activité physique, une palette de caractères. De la teigne à la bonne volonté. Vous êtes nouvelle ? Oui, c’est ma première semaine. Vous allez rester ? Je vais essayer. Le même dialogue se répète dans toutes les chambres. Annie est Aide Médico Psychologique à l’EHPAD des Trois Fontaines à Bourbelon.

A travers l’histoire d’Annie, le texte de Jean-Benoît Patricot est une plongée dans l’univers des EHPAD.Une plongée au cœur du business des vieux. D’un côté, les conglomérats financiers, optimisation, profits. De l’autre, les familles, grinçantes et rares. Écrasés entre les deux, les vieux, pardon, les résidents, et le personnel. Sans oublier la novlangue, qui pastellise les choses. Créer une zone de sécurité, c’est mieux que fermer à clé la porte de la chambre ? La dissociation ? C’est considérer d’un côté la personne, de l’autre son corps.

Jean-Benoît Patricot a écrit un texte ultra réaliste. L’histoire d’Annie, comment elle s’occupe de son père, se retrouve aux Trois Fontaines, après une formation AMP (dix mois). Comment elle essaye de maintenir une couche d’humanité, la dissociation, c’est pas son truc. Comment elle s’attache. Son rythme de travail, la pression, le peu de considération. Les odeurs. Sa solitude. Le désespoir qui ne l’envahit jamais complètement. Comment elle tient. Les liens qui peuvent se créer, si intimes et si superficiels, qui ne survivent pas au décès. Comment elle sera licenciée. Comment, au moment du confinement, elle se retrouvera essentielle.

Jean-Benoît Patricot a écrit un texte politique. Il ne dénonce pas, il décrit. Un monde impitoyable. Il faut cacher les vieux, éviter que l’argent ne file pour des gens qui ne servent plus à rien. Et surtout que ça ne se voit pas. Il raconte l’humanité des personnes qui subsiste malgré l’écrasement, il décrit un système. Il projette une lumière crue sur un système dont on a conscience sans vouloir le voir, l’allongement de la durée de la vie crée une dépendance qu’on ne veut pas voir, s’en occuper est devenu un business comme les autres.

Sur scène, Tessa Volkine, épatante. Habitée par le projet, par le personnage d’Annie. Elle est Annie, elle est tous les vieux dont Annie s’occupe tous les jours. On la voit petit à petit écrasée, on sent le feu de la vie qui toujours brûle au fond d’elle. Mise en scène par Catherine Schaub, un beau travail de direction d’actrice qui souligne le texte avec efficacité et simplicité.

Vous sortirez pétrifiés. Glacés et touchés. Glacés par la description chirurgicale de l’univers des EHPAD, touchés par l’humanité qui persiste. Votre Je n’ai pas envie d’y aller se sera transformé en Je ne veux pas y aller. Mais du coup, comment on fait ?

A La Reine Blanche jusqu’au 18/02/24
Mercredi, vendredi : 21h00; dimanche : 18h00
Durée : 1h15

Texte : Jean-Benoît Patricot
Avec : Tessa Volkine
Mise en scène : Catherine Schaub

Visuel : DR

Cette chronique a été publiée pour la première fois sur www.jenaiquunevie.com

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