Une intéressante vision colorée secoue et actualise la pièce de Molière au Petit Théâtre de Naples, par la Compagnie Icare de Naples, sous la direction de Patrick Rouzaud assisté de Sonia Ouldammar. Je l’ai trouvée d’une grande actualité, en cette avant veille de second tour d’élections présidentielles, qui devraient voir une nouvelle armée de faux dévots s’incliner devant le monarque nouveau.
Je ne vous raconte pas l’intrigue, vous l’avez étudiée au collège. Ce n’est pas la pièce de Molière qui me fait le plus vibrer, à cause de la façon dont elle se termine, qui adoucit le propos et lui retire sa crédibilité.
Les costumes très colorés ramènent l’action dans les années 1920, la mise en scène joue avec la salle, la distribution avec le genre des comédiens. Avoir donné le rôle titre à une femme m’a d’abord surpris, et puis j’ai trouvé que ça renforce le propos et la faculté de manipulation du personnage. J’ai apprécié les intermèdes musicaux.
J’ai eu beaucoup de plaisir à retrouver le jeu de Laurent Gérardin (Orgon), Thomas Besset (Cléante) et Nathalie Missègue (Tartuffe) que j’avais vus l’an dernier dans Les Justes, ils sont la colonne vertébrale de la pièce, appuyés par Sonia Ouldammar (Elmire), qui était aussi dans la distribution de Les Justes et j’avais vue cet hiver dans Trahisons. Je sentais dans leur diction la précision et le respect scrupuleux de l’alexandrin et du texte de Molière.
La salle a une acoustique particulière, les spectateurs sont dans un espace qui résonne, les rideaux noirs de la scène absorbent le son. J’entendais du coup d’autant plus clairement les voix qu’elles étaient graves, et qu’elles étaient proches du fond de scène, du coup les voix de femmes jouant en bord de scène, voire dans la salle, me parvenaient brouillées.
Il m’en reste le plaisir d’avoir retrouvé des comédiens dont j’apprécie le jeu, une mise en scène imaginative, et une pièce qui remet à leur place les vieux conservateurs.