
En prévision de la fin du monde et de la création d’un nouveau aux Plateaux Sauvages : Pauline Sales signe une très belle pièce, une prise de conscience émouvante que nos enfants sont prêts face au monde qui change brutalement sous leurs yeux.
La scène matérialise l’intérieur d’une cave aménagée en bunker survivaliste, lit de camp, pharmacie, stock de nourriture non périssable. Sur une chaise, Sofia est assise, ligotée, bâillonnée. Des vigiles ? Pourquoi faire ? Protéger la salle ?… Qu’est-ce qu’elle dit ?
C’est Madison, 11 ans, qui mène cette prise d’otage. Sofia a aussi 11 ans, c’est la Maire du Conseil Municipal des Enfants, pour la deuxième fois. Madison s’est présentée, elle n’a eu aucune voix. Et Ethan ? Il n’est pas vraiment sûr de vouloir être embarqué dans cette histoire, mais il y est.
Pour Madison, le CME ne fait pas grand chose, pour qu’on l’entende, Madison va utiliser la force. Aidée par Ethan, qui voudrait que tout le monde s’entende, suivie par Sofia, qui a déjà compris qu’une fois qu’on a le pouvoir, rien n’est possible. Pour Madison, l’important n’est pas d’avoir des idées, c’est d’avoir une vision. Sa vision ? il faut se préparer au monde d’après puisque c’est la fin du monde comme il est, de ce monde qui marche de travers, qui met des vigiles à la boom des CM1-CM2.
Du fond de leur cave, les voilà partis dans un road trip de rebelles sages. Leurs revendications ? Une liste d’acronymes savoureux. Dont l’ODFUCEPA, qui ferait tellement de bien.
Ils sont idéaliste, réaliste, rebelle. Venus d’une grande maison avec son jardin, d’un appartement bondé de frères et soeurs, d’un foyer d’éducation. Ils sont très différents, ils se retrouvent, s’écoutent, se comprennent, s’entendent. Quand les adultes interviendront, ils seront unis. Quand le monde changera, ils seront prêts.
Quand le monde s’est confiné, ils étaient prêts.
En Prévision de la Fin du Monde est de ces pièces qui m’embarquent totalement. Le texte de Pauline Sales, qui signe également la mise en scène, est fin, il parlera autant aux adultes qu’aux enfants, expliquant à chacun ce qui peut se passer dans la tête de l’autre. Le jeu de Vinora Epp, Jacques-Noël Delgado et Noémie Pasteger est particulièrement juste, particulièrement convaincant. Tous les trois jouent des enfants de dix-onze ans, sans jamais les singer, sans les caricaturer.
Là où les enfants de Normalito appréhendaient leur différence, les enfants de En Prévision de la Fin du Monde se retrouvent face à un monde qui change brutalement. La leçon émouvante de la pièce, c’est qu’avec leurs âmes d’enfants, idéaliste, réaliste ou rebelles, ils sont prêts, étonnement prêts, quand il s’agit de se parler à un mètre, de faire une boum en vidéo. Et qu’on peut leur faire confiance.
En Prévision de la Fin du Monde et de la Création d’un Nouveau. Il faut lire le titre jusqu’au bout.
Une pièce à voir, à entendre, à recevoir. Avec confiance. Avec émotion. Le monde a de nouveau changé brutalement. Ils sont prêts.
Aux Plateaux Sauvages jusqu’au 6 avril 2022
Mardi 29 mars / vendredi 1er avril / mardi 5 avril : 19h00
Mercredi 30 mars / mercredi 6 avril : 14h00
Jeudi 31 mars / lundi 4 avril : 10h00 et 14h00 (scolaires ouvertes au public)
Samedi 2 avril : 16h00
Texte : Pauline Sales
Avec : Jacques-Joël Delgado, Vinora Epp, Cloé Lastère ou Noémie Pasteger
Mise en scène : Pauline Sales
Visuel : Pauline Le Goff