Une belle version d’Oncle Vania, qui a gardé tout le sel de la pièce, qui rappelle son actualité. Un beau travail de troupe. Un résultat fluide à savourer et à applaudir.

Sur scène, une grande table, dressée. Une femme prépare une salade de fruits. Une voix off parle de l’attachement, du souvenir qui est plus une odeur qu’une image. Le dispositif est immersif, certains spectateurs sont assis sur la scène, les premières répliques viendront de la salle.
C’est une grande maison, quelque part. Dans cette maison, des hommes et des femmes sont épuisés. Par les travaux, le manque de sommeil. Certains y vivent, en vivent. D’autres y séjournent, d’autres encore sont de passage. Avec la fatigue, sous l’effet de l’alcool, les sentiments et les jalousies vont s’exprimer. Jusqu’à ce que la vie reprenne. La nuit a passé, les sentiments sont inutiles, chacun s’est résigné à son destin.
Vania est une belle pièce de troupe, de celles que j’apprécie, où le travail sur les personnages et les situations les a rendus naturels, où le jeu collectif est fluide, où le rythme est le bon, assez lent pour que les situations s’installent, assez rapide pour tenir l’attention du spectateur. Avec un grand moment dansé, un moment de révolte contre l’autorité, un moment où sensualité et désirs s’expriment librement.
Le texte d’Oncle Vania est resté très actuel. On y trouve des sentiments qui ne sont pas partagés, de la jalousie sentimentale et financière, de la volonté de contrôler, de posséder. On y trouve une réflexion (déjà) sur l’homme qui contrôle la nature, sur la forêt et les animaux qui s’effacent devant les cultures et les villes.
Le vrai héros de la pièce, c’est la propriété. Reçue en héritage, elle nécessite du travail pour en vivre aujourd’hui, de l’exploiter de façon raisonnée pour en vivre demain. Bien sûr ils pourraient la vendre, mieux vivre aujourd’hui, mais de quoi vivraient-ils demain ?
Une belle version d’Oncle Vania, qui a gardé tout le sel de la pièce, qui rappelle son actualité. Un beau travail de troupe. A savourer et à applaudir.
Au théâtre de Belleville jusqu’au 27 octobre 2019
Jeudi-vendredi-samedi : 21h15 / dimanche : 17h30
D’après : Anton Tchekhov
Avec : Lucile Barbier, Delphine Bentolila, Stéphane Brel, Nicolas Dandine, Magaly Godenaire, Lionel Latapie, Laurence Roy, Julien Sabatié Ancora
Mise en scène : Julien Sabatié Ancora