Petits Contes de la Solitude – Les Déchargeurs – Julie Macqueron a du talent, et la solitude optimiste

Petits Contes de la Solitude aux Déchargeurs : il y a du bon et du moins bon dans ces Quatre Contes écrits et mis en scène par Julie Macqueron. Le troisième conte, un bijou que j’ai savouré sans réserves : un monde isolé sous des dômes, contrôlé par des conglomérats, où la vie est la plus forte.

Sur la scène, un homme est assis devant trois grands miroirs sur pied, il porte un chapeau conique argenté, chantonne Happy Birthday to you. Eh bien bon anniversaire Gigi !

C’est le premier des Petits Contes de la Solitude. Il ouvre le spectacle, servira d’intermède entre les trois autres. Plus qu’un spectacle homogène, ce sont quatre petites pièces qui s’enchaînent avec pour point commun de se dérouler dans un futur relativement proche. Elles sont d’un niveau inégal, ou s’adressent à des audiences différentes. Plutôt que de parler du spectacle dans sa globalité, considérons chacun de ces contes, dans leur ordre chronologique.

Premier conte, l’anniversaire de Gigi. Il est seul pour son anniversaire, ses invités ont deux heures de retard, ça fait beaucoup. Ça pourrait être Le Bal d’Irène Némirovsky, c’est l’Âge de Cristal. Il n’y a pas d’effet de surprise, c’est annoncé sur le flyer. Il attend la fin, moi aussi.

Deuxième conte, une influenceuse dans le Métavers. Une jeune femme part explorer le Métavers, elle y passe trois mois, laissant dans le monde réel sa mère, son copain, sa meilleure amie, et son docteur. Ils pourraient se tenir les coudes, ils passent leur temps à exposer leurs ressentis au moyen de leur smartphone. Le sujet reste traité à la surface, les effets comiques sont répétitifs.

Troisième conte, le monde des conglomérats. C’est un bijou. Le monde est recouvert de dômes, et contrôlé par des conglomérats. En dehors de dômes, il y a une vie, elle fait peur. Sous les dômes, il faut contrôler la population, sa reproduction. Des maximes simples, une police de la pensée politique, la recette a fait ses preuves, et pas seulement dans la littérature.

Dans une entreprise chargée de la surveillance, deux employés font leur boulot, et ils le font bien. On ne constate pas sans conséquences qu’on peut sortir hors du dôme sans mourir, qu’il existe une force qui pousse les êtres humains à donner la vie. On n’entend pas de poésie sans être touché. Le désir naît, puis l’amour. Mais l’entreprise veille, et le choix peut devenir cornélien.

C’est un thème récurrent de la science fiction, de l’anticipation ? Oui, bien sûr, c’est ce qui rend l’exercice difficile de trouver un axe intéressant voir original pour le traiter. L’exercice est d’autant plus difficile, il faut arriver à se distinguer.

Ce conte m’a séduit par le fond de son propos, par l’agilité de certaines répliques. Il y a une vraie intrigue, creusée, solide. J’ai apprécié son esthétique, savouré le jeu des acteurs, c’est là qu’ils sont les plus solides, les plus convaincants. Quand il a pris fin, j’étais parti dans son monde. Et un peu frustré, il reste des arcs narratifs inexplorés.

Quatrième conte, l’ami robot. Enfin… pas vraiment un robot, c’est la chute, ne spoilons pas. Disons qu’on est quelque part entre Asimov et le Soleil Vert. On se souvient que Google a licencié l’an dernier Blake Lemoine, un de ses chercheurs qui affirmait qu’une Intelligence Artificielle était devenue consciente. Qu’un Belge éco-anxieux s’est suicidé après six mois de dialogue avec un ChatBot. Un vrai sujet, donc, une approche intéressante, avec des échos de patriarcat, qui mériterait un traitement plus… fin.

Un avis partagé, donc. Il y a du très bon, du bon, et le reste. Accompagné d’une conviction, Julie Macqueron a la solitude optimiste. Et du talent. On a envie de lui citer ce philosophe anglais qui à 22 ans tenait la position que What a drag it is getting old, de lui souhaiter la même durée de vie sur les scènes.

Aux Déchargeurs jusqu’au 25/04/23
Dimanche, lundi, mardi : 21h00
Durée : 1h40

Texte : Julie Macqueron
Avec : Julien Cheminade, Sarah Cotten, Victoire Cubié, Charles Dunnet, Heloïse Lacroix
Mise en scène : Julie Macqueron

Visuel : Julien Cheminade / Léa Rousse Radigois

PS : vraiment le troisième conte est excellent, il y a de belles scènes, des trouvailles dans le texte. Il mériterait d’être repris pour vivre sa vie de façon autonome, en allant au bout des sujets qui restent en suspens.

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