
Les Oubliés aux Déchargeurs : Jean Céline Borel écrit un voyage initiatique au cœur des ténèbres de la personnalité humaine, une expérience de Milgram apocalyptique dans le huis clos d’un mirador où cinq hommes attendent une relève qui ne viendra jamais.
Sur la scène, ils sont cinq, assis, debouts, les yeux fixes. On entend des vagues. J’ai soif, j’ai faim, j’ai peur…
Ils sont cinq, et ils attendent, dans un mirador. Le hasard, sous la forme d’un lancer de dé, les a désignés pour rester là, pendant que leur régiment partait ailleurs. Ils sont cinq personnalités, et dans l’espace de ce mirador, la lassitude va s’installer, puis la faim, le désespoir. Voilà les souvenirs, obsédants, la maladie. Bientôt ils ne sont plus que quatre, trois, deux, un.
Le texte de Jean Céline Borel emporte le spectateur dans un univers sombre et sans espoir. J’y ai trouvé l’attente du Désert des Tartares, une touche de l’expression de Beckett, un rappel de l’expérience de Milgram.
Dans ce mirador, mais bien avant à Monrovia, un homme parfaitement normal qui rêve de retrouver sa femme et ses deux enfants prend le visage d’un monstre, raciste, homophobe, prêt à tuer une enfant, prêt à tuer son plus proche ami parce que c’est son devoir, à le faire de ses propres mains, parce que les balles sont comptées.
Nicolas Nasciet, Romain Pichon, Thomas Perriau-Bébon, Clémence Barbey et Clément Durécu servent le texte avec une empathie parfois débordante, les sentiments s’expriment, le spectateur les ressent pleinement. Alors les images débordent de la scène, je me souvenais que si un Marlow venait mettre fin à la folie de ce Kurtz, il le ferait au prix de son innocence, découvrant la part sombre de sa personnalité.
Un voyage initiatique au cœur des ténèbres à faire aux Déchageurs.
Aux Déchargeurs jusqu’au 31 janvier 2023
Dimanche, lundi, mardi : 21h00
Texte : Jean Céline Borel
Avec : Nicolas Nasciet, Romain Pichon, Thomas Perriau-Bébon, Clémence Barbey, Clément Durécu
Mise en scène : Jean-Céline Borel
Visuel : Léa Rousse Radigois
Une réflexion sur “Les Oubliés – Les Déchargeurs”