
KAL, je t’aimerai jusqu’à la fin des temps à l’Échangeur Bagnolet : la légende réunionnaise de la grand mère Kalle dans une inspiration japonaise, une cascade d’émotions successives, de la beauté, de la poésie.
La scène est couverte de grands confettis blancs. On aperçoit quelques instruments de musique, de ceux qui ne figurent pas dans l’orchestre symphonique. Un tronc de câbles emmêlés descend des cintres. Voilà une femme vêtue d’une robe blanche un peu japonaise, qui fait sonner un timbre… Ting… Ting... elle commence à chanter une histoire de vents.
Kal entre en scène, dans son manteau gris, elle a la peau des jambes rouge, les lèvres bleues, un parapluie, elle se bat contre le vent. Ram la suit, il est gelé, il grelotte.
Kal est la femme du volcan, Ram est l’homme de la pluie. Ram est venu de son île, une île de cultivateurs qui donnaient la moitié de leurs récoltes aux chasseurs du continent. Quand l’île a brulé, il est venu sur le continent. Kal n’est pas un chasseur, elle été la proie, violée, elle s’est réfugiée dans le ventre du volcan qui l’a transformée, nettoyée. Kal et Ram ne se comprennent pas, entre eux il y a la musique, le chant, les émotions.
Au delà de la variation sur le conte réunionnais de la grand-mère Kalle, à travers son inspiration japonaise, le spectacle est une cascade d’émotions, d’interrogations successives. Une ligne de force, majeure, l’amour entre Kal et Ram, cet amour qui leur redonne la force de vivre, cet amour impossible qui peut durer jusqu’à la fin des temps.
Des émotions parallèles, la solitude de l’homme qui a abandonné l’île qui ne peut plus le nourrir, qui se retrouve seul, désarmé, sur un continent qu’il ne comprend pas. Le rouge des jambes de la femme, le bleu de leurs lèvres, la glace, le feu. Quel est le symbole de ce feu intérieur qui la maintient en vie, est-il la vengeance, ou la force du désir de la succube domptée ? Le feu et l’eau se rencontrent, quel est leur avenir ?
Émotions devant le jeu de Martin Jaspar, j’avais froid avec lui, je frissonnais. Émotions devant le regard de Chloé Lavaud-Almar, elle ne prononcera qu’une seule phrase de tout le spectacle, tout son jeu est de danse, son regard vous fixe, il est puissance, il est menace qui réchauffe, il est peur. Émotions quand les instruments d’Elsa Dupuy sonnent, quand sa voix s’élève.
Théâtre, musique, danse, si vous êtes amateur d’une de ces disciplines, vous apprécierez cette création de la compagnie Soleil Glacé, Paul Francesconi, qui signe le texte et la mise en scène, nous fait le cadeau d’un moment de poésie, d’un moment de beauté, une cascade d’émotions successives qui emplissent le spectateur. Des émotions, des ouvertures, à l’autre, cet autre qu’on ne voit plus et qui a traversé le monde pour venir geler à nos pieds. Des émotions, des ouvertures, une conviction viscérale, l’amour est une force vitale qui peut durer jusqu’à la fin des temps.
J’ai savouré sans tout comprendre les chants créoles, je sais maintenant ce qu’est un paille-en-cul.
A l’Échangeur (Bagnolet) jusqu’au 16/04/22
Du lundi au samedi : 20h30
Texte : Paul Francesconi
Avec : Elsa Dupuy, Martin Jaspar, Chloé Lavaud-Almar
Mise en scène : Paul Francesconi
Compagnie Soleil Glacé