Dépendances explore le lien de fraternité, un lien qui unit malgré les années, que certains arrivent à briser, d’autre pas.

La scène est nue, on voit les murs de la salle à cour et à jardin, les portes qui mènent en coulisse. Une grande toile verticale au fond, le rendu d’une verrière. Deux chaises, un tabouret. Le son de vagues qui vont et viennent. Henri et Tobias arrivent sur scène, Tobias s’assied. Et c’est le silence. La tension s’installe.
Il y a Henri, qui a plutôt réussi, et Tobias, sa situation est moins bonne. Leur mère est « en bas », leur père est mort. Ils sont dans un appartement vide, un triplex, une occasion annuelle indéfinie. L’appartement est vide, mal entretenu, il était loué. Ils attendent Carl. Le dernier, qui réussissait tout. Carl n’arrive pas, ils retrouvent les jeux de l’enfance, s’affrontent, se battent. La tension qui s’est installée va croissant, et Carl n’arrive pas.
La première fois que j’ai vu Le Grand Sommeil, je suis sorti en me disant que c’était un très bon film, mais qu’il y avait vraiment un truc que je n’avais pas compris, j’ai su plus tard que personne n’avait compris, que l’auteur ne savait pas, et que ce n’était pas important.
Dépendances me fait un peu le même effet. Pendant les premières minutes de la pièce, je me suis senti dans un Beckett, des silences, du non sens. J’ai apprécié l’utilisation de l’espace, la mise en scène. Savouré le jeu des acteurs, c’est difficile de jouer les silences. J’attendais l’explosion annoncée, « dans un thriller glacé, le secret qui réunit les deux frères ne pourra pas rester caché jusqu’au bout« , plus la tension montait, plus j’attendais un cadavre dans le grenier. Sans le trouver.
La nuit passée dessus, Dépendances est devenue pour moi une pièce sur la fraternité, une fraternité dysfonctionnelle. Quand ils étaient petits, chacun avait son rôle, et les rares fois où ils se retrouvent, ils reprennent leur rôle, leurs jeux, les rejouent, de la même façon. Un an avant, Tobias a emmené Henri à l’aéroport pour l’avion de minuit, il le fait cette année, il le fera l’an prochain. Ils s’aiment et se détestent, ils voudraient couper la fraternité mais le lien est le plus fort. Inexorable. Carl a coupé ce lien, l’idée de Carl est d’autant plus présente. J’ai mon idée, je ne suis pas vraiment sûr d’avoir compris.
Dépendances est une pièce avec des silences, qui installe une vraie tension entre ses deux personnages, qui laisse le spectateur chercher son interprétation, servie par deux magnifiques acteurs. Une pièce psychologique.
Au théâtre du Rond Point jusqu’au 9 février 2020
Du mardi au dimanche : 18h30
Texte : Charif Ghattas
Avec : Thibault de Montalembert, Francis Lombrail
Mise en scène : Charif Ghattas