Deux acteurs magnifiques, un beau texte, une belle mise en scène. Sans beauté, comment supporter le réel ? Un coup de coeur à voir, un bonbon à savourer au Théâtre de la Contrescarpe.

Une belle scène nous attend, fond blanc, guirlandes de feuilles blanches, un tabouret de piano blanc, deux petits pianos. Dans les enceintes, une gymnopédie. Dans la salle, les spectateurs échangent, « Satie, on ne sait pas vraiment qui c’est, mais tout le monde connait ». La pièce commence, le directeur de l’hôpital psychiatrique est au téléphone avec la police, deux personnes ont disparu. Le temps remonte, une heure en arrière. Un homme, binocle et melon, dialogue avec son infirmière. Elle s’appelle Anna, il s’appelle Erik Satie, comme tout le monde.
Laetitia Gonzalbes a monté sa pièce comme Night M Shyamalan aurait monté un film. Plus on en raconte, plus on induit en erreur, sauf à raconter la fin, et ça serait dommage. Retenez que vous apprendrez des choses sur la vie d’Erik Satie, et que vous serez pris, passionné. J’avais aimé son Anna Karénine, j’ai adoré son Erik Satie.
Le duo Eliott Jenicot – Anaïs Yazit est magnifique, tout au long de la pièce ils sont en osmose, synchrones. Complices. Ils jouent, ils chantent, ils dansent. La sévérité amusée de l’un, l’ingénuité de l’autre servent le texte qui file naturellement. Sur le fond de scène, des dessins, des animations. La vidéo au théâtre est souvent une facilité. Ici c’est un troisième personnage qui donne une perspective, un clin d’œil. Je pourrais aussi vous parler de la lumière, je l’ai trouvé sculpturale.
La pièce parle d’Eric Satie ? C’est un prétexte, pas un biopic. Un prétexte à un voyage, un beau voyage onirique, un grand moment de théâtre. Je me suis laissé emporter du début à la fin, emporter par chacun des deux personnages, emporter par la beauté, emporter par le jeu et la complicité des deux acteurs.
Je m’appelle Erik Satie comme tout le monde est à la fois un coup de cœur et un bonbon. Un coup de cœur parce que c’est beau, bien fait, bien joué. Un bonbon parce que j’en suis sorti de bonne humeur, en me sentant bien. « Sans beauté, comment supporter le réel ? ».
Un grand bravo.
Au théâtre de la Contrescarpe jusqu’au 4 janvier 2020
Du mardi au samedi à 19h00
Texte : Laetitia Gonzalbes
Avec : Elliot Jenicot, Anaïs Yazit
Mise en scène : Laetitia Gonzalbes
Illustrations et animations : Suki