Une mise en scène moderne pour ce Misanthrope réduit à 5 acteurs, qui permet à Lennie Coindeaux de confirmer son talent. Deux raisons d’aller voir la pièce.
Le Misanthrope. L’histoire est un peu connue. Alceste hait l’humanité et l’hypocrisie, aime Célimène… mais la belle est voletante, il finit par le voir, et se retire en province.
Caroline Rainette réduit l’action à six personnages, interprétés par cinq acteurs. Avec quatre chaises, ils sont une fois chez Alceste, une fois dans une boite de nuit, une fois dans un tribunal. Blouson de cuir, jean, smartphone, Alceste est un homme de notre époque. L’univers est posé, à notre époque contemporaine, notre époque qui se judiciarise, le résultat du procès de celui qui refuse les codes et l’hypocrisie est le même qu’en 1666.
Ca faisait longtemps que je n’avais pas revu le Misanthrope, j’ai eu plaisir à le retrouver, même si à chaque fois Célimène l’abandonne à la fin.
Savoir si une représentation du Misanthrope va être savoureuse, on le sait très vite. Au bout cinquième vers, précisément. Les deux « Laissez-moi » sont passés, arrive « Moi, je veux me fâcher, et ne veux point entendre ». A ce moment là, le rythme est pris, je me cale pour savourer… ou j’attends la fin.
Hier soir, je me suis calé pour savourer. Lennie Coindeaux venait de me les servir avec une énergie, une agressivité, je savais que j’allais voir un grand Misanthrope. Et j’ai vu un grand Misanthrope. Je l’ai savouré.
J’ai apprécié le traitement moderne apporté à la pièce. Six personnages suffisent à focaliser le propos, il reste percutant, il ne manque rien. L’utilisation des codes du monde judiciaire pour trancher la psychologie des personnages ? Ca marche. Alceste assis tout seul dans son coin dans la boite à la mode, qui finit par vider sa bouteille au goulot ? Ca marche !
On peut épiloguer sur le fait de savoir si il faut ou non respecter à la lettre le rythme de l’alexandrin et la rime du XVIIIe siècle. La troupe a choisi de le faire, ils le font correctement, c’est l’essentiel.
Alceste, Lennie Coindeaux, grand. Très grand. Autour de lui, une mention particulière pour Camille Cieutat, qui livre une Arsinoé et une Eliante tellement différentes que j’ai eu du mal à me rendre compte qu’elles étaient jouées par une seule et même actrice.
Je suis plus réservé sur le traitement d’Oronte, son texte le rend ridicule, il n’y pas besoin d’en faire plus.
J’étais heureux de retrouver l’équipe de Légende d’une Vie. Ils confirment l’opinion positive que j’en avais il y a deux ans.
Vous voulez une raison d’aller voir ce Misanthrope ? Il est moderne, rythmé. Il est bon. Une seconde ? Vous pourrez dire dans dix ans que vous avez vu Lennie Coindeaux dans une petite salle.
Au Théâtre Douze jusqu’au 9 décembre 2018
jeudi-vendredi-samedi : 20h30 – dimanche 15h30
Texte : Molière
Avec : Lennie Coindeaux, Bruno Aumand, Camille Cieutat, Caroline Rainette, Jérémie Hamon
Mise en scène : Caroline Rainette
Compagnie : Etincelle