Un beau moment de théâtre, une heure avec un poète aussi candide et lucide qui nous explique pourquoi le spectacle ne peut avoir lieu ce soir.

(c) Stéphane Trapier
14 juillet est un spectacle édifiant sur la condition du monde paysan. Non. De celui-là il ne reste que le titre, il n’a pas été financé. C’est donc un spectacle sur la prise de parole en public en entreprise. Non. Hier, le directeur du théâtre a refusé.
En assistant à 14 juillet, j’ai revécu un grand moment d’il y a… tant d’ans. Guy Bedos, dans un théâtre de Province, il entre sur scène, on entend les percussions d’une perceuse dans la structure du théâtre, il part en live. Le combat a duré une demi heure, ça s’est calmé, le spectacle a commencé, il n’était pas dedans, il se méfiait. A raison, les percussions sont revenues. Ca a été une explosion finale. Un moment unique.
14 juillet, c’est exactement cette humeur. Un comédien arrive sur scène, commence par annoncer que le spectacle n’est pas celui annoncé, que ceux qui veulent peuvent quitter la salle. Lui part dans une sorte de délire, mêlant la campagne normande post 45 (et non post 68) à la caricature des travers du monde du théâtre, racontant comment on peut séduire une femme mûre en lui disant du Claudel, pourquoi Freud s’est appuyé sur Œdipe et non sur Sigismond, comment Adjani est restée bloquée dans Camille Claudel.
14 juillet, c’est un spectacle comme un feu d’artifice, il commence fort, maintient le rythme, au bout d’un moment on a l’impression que ça baisse un peu, que ça se met à ronronner, là on est en condition pour le bouquet final, bam.
14 juillet, c’est une sorte de poésie candide et lucide sur l’impossibilité de jouer ce soir. Un clown naïf et désarmé venu passer le temps avec nous.
Il m’a fait revivre un de mes meilleurs souvenirs, qu’y a-t-il de plus précieux ? C’est aussi ça, le théâtre.
Théâtre du Rond Point jusqu’au 4 novembre 2018
du mardi au samedi 20h30 – dimanche 15h30
Texte : Fabrice Adde
Avec : Fabrice Adde
Mise en scène : Olivier Lopez