Au delà du projet de raccrochage, Nous sommes le vent debout est un beau spectacle tripal, viscéral, des jeunes racontent des histoires de vie, leur vie. Un spectacle touchant, émouvant. A aller voir quand il passera près de chez vous.
Un jeune homme à crête de punk monte sur la scène, caleçon et boots, il chante Roméo et Juliette, on est dans Shakespeare autant que dans le Bal des Lazes. Et il m’a embarqué. Dans les paroles de sa chanson. Dans la douceur inquiète de son regard. Quand le premier rang est monté sur scène pour l’accompagner, j’ai compris que j’allais vivre un grand moment.
Bien sûr il succédait à une présentation de l’Envol. Du projet de raccrocher des jeunes qui ont décroché et perdu confiance en la vie, de leur redonner, à travers l’art, l’envie, l’espoir, le sourire. Bien sûr le flyer précise que « Depuis mai 2017, une douzaine d’Arrageois âgés de 16 à 35 ans sont élèves d’une classe un peu particulière. Décrochés scolaires, allocataires du RSA ou en attente de trouver leur premier emploi, ils ont suivi une formation artistique tout en travaillant à l’écriture d’un projet de vie et à une intégration citoyenne dans la société, grâce au centre d’art et de transformation sociale L’Envol dans le Pas de Calais. Dans Nous sommes le vent debout, spectacle issu de leur atelier, ce sont des histoires de vies, celles de la jeunesse d’aujourd’hui et des quartiers dits « populaires ». Les mots qu’ils livrent sont bruts, parfois dérangeants, mais toujours empreints d’espoir. Ni comédiens ni auteurs, ils prennent possession du théâtre comme espace de dialogue, tribune où le chant, la danse et le jeu se conjuguent au pluriel. Un regard sans concession sur notre présent. »
Tout ça n’avait plus aucune importance. Quand il est monté sur scène, il n’y avait plus que le spectacle. Le spectacle d’un groupe, d’une troupe. Chacun à son tour est en avant, chacun à son tour est dans la lumière. Seul sur scène ou avec le soutien des autres, il vient, nous dit qui il est. Il le dit avec son cœur. C’est tripal, viscéral, sincère. Chacun m’a touché. J’ai souvent eu les poils dressés.
Je voudrais me souvenir de chacun, avoir le texte pour pouvoir citer chacun. Ils jouent, chantent, dansent. La forme est percutante, le fond est puissant. Le texte est beau, il contient de très belles phrases. Que je n’ai pas notées. Trop pris par le spectacle pour l’analyser sur le vif. C’est une grande qualité, pour un spectacle, d’embarquer ses spectateurs, de leur couper le souffle, de ne pas les laisser réfléchir. Il reste mes images dans la tête. Les émotions ressenties, nombreuses, fortes.
Oui, le spectacle m’a touché. Il est loin de ces multiples seuls en scène « Moi, ma vie, mon problème, mes états d’âme, je vous le raconte moi-même parce que je pense que ce qui m’est arrivé à moi peut vous intéresser ». C’est un spectacle qui crie, qui vit. Techniquement ce n’est pas le plus beau spectacle que j’ai pu voir cette saison. Emotionnellement, c’est sans doute celui qui m’a le plus touché. Entendons-nous bien. Le spectacle, au delà du projet de L’Envol. Le spectacle a vécu au delà des représentations de fin de session. Le spectacle est venu à Paris. Le projet de l’Envol est réussi. Puisse le spectacle trouver un tourneur, des dates. Puisse le spectacle continuer. Il le mérite, ils le méritent.
Baroudeur m’avait accompagné, qui s’est lui aussi laissé embarquer, toucher. Parfois blotti contre moi. Il l’a trouvé très beau, parfois très triste, toujours très émotionnant.
A tous ceux qui étaient sur scène, à ceux qui les ont accompagnés, je veux dire un grand bravo. Hier soir, vos envies, vos espoirs, vos sourires se sont conjugués, vous avez donné un vrai beau spectacle. Vous étiez des comédiens, des danseurs, des musiciens, des chanteurs.
A la Maison des Métallos le 2 juin
Création collective : Bruno Lajara, Johanna Classe, Céline Dely, Perrine Fovez, Flavien Riez, Gregory Watin, Olivier Floury
Avec Jordan Alphonce, Graziella Arquinet, Corentin Demuynck, Corentin Dessinges, Romain Dufour, Fiona Filliaert, Lucile Lecocq, Clarence Lhopitault, Justine Lhuittre, Emilie Lutun, Julie Salembier, Allan Stortzs