Neuf – Théâtre 13 (Seine)

Quatre femmes, cinq hommes, neuf personnes désignées par le sort pour être jurés du procès de Karim Bourdon entrent en délibération. Voilà ce que nous fait vivre la pièce de Stéphane Guérin au Théâtre 13, jouée par Le Petit Théâtre de Pain.

Neuf

On retrouve la trame de 12 hommes en colère, l’approche est bien différente, elle passe par l’intermédiaire de 12, une pièce russe dans laquelle l’accusé est un enfant Tchétchène.

Neuf s’intéresse à l’histoire de chacun des jurés, met chacun des jurés face à lui même, face à ce qui est important pour lui plus qu’à ce qu’il croit être ses valeurs, face à son histoire, face à la difficulté de parler de son histoire aux autres.

Enseignante, médecin venu de l’ancienne Tchécoslovaquie, chef d’entreprise, artiste faisant face aux besoins de sa mère impotente, beauf fan de foot, hypégiaphobe, viticulteur ardéchois ancien militaire, femme enceinte, chômeur homosexuel… neuf profils différents, neuf humanités différentes face à une décision.

En plus de mettre chacun des jurés face à ses peurs, Neuf met le jury face aux peurs collectives, l’accusé est un Cap Verdien abandonné puis adopté par une famille française, il a du mal à s’intégrer, flirte avec la petite délinquance, il est le coupable idéal. Coupable, ou victime, la question ne vient plus de la bonne conscience, mais de la crise de conscience, comprendre ce qui lui est arrivé, décider, en conscience, de la meilleure décision, pour lui dans la société. Une société qui a peur, peur de l’autre, de celui qui a une culture différente, une vie différente, une classe sociale différente, une société où chacun a peur de l’autre tant qu’il ne le connaît pas, message qu’il faut porter et porter encore.

Ma seule interrogation, pourquoi la pièce passe-t-elle à côté de l’exploration des actes de l’enfant de 12 ans, j’ai manqué d’une réaction au moins choquée devant l’écart entre age et actes.

Au premier vote, une seule main se lève en faveur de l’accusé, l’équilibre s’inversera au fil du dévoilement de chacun, une seule main se lèvera contre lui, et l’enjeu basculera.

Le dispositif scénique met le spectateur dans l’action, qui peut s’assoir sur les gradins habituels, ou dans deux gradins construits pour l’occasion (qui font penser à l’organisation de la chambre des Communes), à cour et jardin, il est spectateur, pour, contre. Assistance, accusation, défense. La troupe est homogène, fonctionne parfaitement, avec de grands moments de travail de groupe (ne ratez pas l’ouverture de la fenêtre !), on sent qu’ils travaillent ensemble depuis 25 ans. Avec un tropisme basque.

La salle a applaudi avec enthousiasme.

Baroudeur était là, spectateur attentif et passionné, sorti plein d’interrogations, touché. Pour une fois, je n’étais pas sûr d’avoir raison de l’emmener, prêt à le protéger de propos ou d’images trop dures, je n’ai pas eu besoin de le faire, et de son premier rang, il a savouré l’idée de l’importance de la complicité Père-Fils.

Une belle pièce, qui mérite votre attention.

Au Théâtre 13 (Seine), jusqu’au 26 mars, du mardi au samedi à 20h00, le dimanche à 16h00

Le site de la compagnie Le Petit Théâtre de Pain

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