
En attendant Godot à La Scala Paris : quand Alain Françon sublime Samuel Beckett, c’est essentiel, c’est magique, c’est à ne pas rater. Allez-y.
Le sol de la scène, et le fond, ont le grain des vieilles photographies, dans des tons de gris et de sable. Tout est sec, l’eau ne coule plus. Une pierre, un arbre. – Rien à faire – Je commence à le croire…
On est à la campagne, Vladimir et Estragon sont deux vagabonds, ils attendent Godot. Sans vraiment savoir pourquoi, ni qui il est, ni même s’ils sont au bon endroit ni au jour dit. Dans un sentiment constant de déjà vu, ils passent le temps, jusqu’à l’arrivée de Pozzo et Lucky, le propriétaire des lieux auto-affirmé et son esclave domestique. Plus tard, un jeune garçon viendra dire que Godot ne viendra pas, qu’il viendra demain. Le lendemain, la journée recommence, l’arbre a des feuilles.
En attendant Godot est sans doute la pièce la plus connue de Samuel Beckett, les personnages sont là, ils attendent, il ne se passe presque rien, leur monde se délite dans une attente absurde.
Alain Françon s’est saisi de Godot et l’a sublimé. Chaque mot est porté, enchâssé. Le texte est là, merveilleusement servi. Dans la mise en scène, dans le jeu des acteurs, tout est précis, ciselé, au cordeau.
Il y a une magie dans le texte de Beckett, cette journée absurde qui se répète, les sentiments des personnages infusent dans les spectateurs. Une magie qui met le sourire aux lèvres du spectateur, et quand il rit, c’est face à lui même, face à ce qu’il a éprouvé, loin de s’être laissé emporter dans un éclat général.
Pour décrire le travail d’Alain Françon, j’irais volontiers chercher les mots de la chimie, raffiné, épuré, sublimé. Le résultat est d’une simplicité absolue, évidente, magique. J’ai retrouvé avec un immense plaisir un écho de Jacques Tati dans le Vladimir de Gilles Privat, savouré l’Estragon râleur et souriant d’André Marcon, l’abomination comique de Guillaume Lévêque en Pozzo. J’ai souri, j’ai ri. Avec toute la salle, longuement applaudi.
En programmant En attendant Godot mis en scène par Alain Françon, La Scala nous offre un moment de théâtre aussi magique qu’essentiel.
Alors on y va ? – Allons-y.
A La Scala Paris jusqu’au 8 avril 2023
Du mardi au samedi : 21h00 – Dimanche : 17h00
Texte : Samuel Beckett
Avec : Éric Berger, Guillaume Lévêque, André Marcon, Gilles Privat, Antoine Heuillet
Mise en scène : Alain Françon
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