
Pauline & Carton etc. à l’Artistic Théâtre : Christine Murillo est Pauline Carton venue se livrer sur la petite scène intimiste de l’Artistic Théâtre. Elle est merveilleuse, ce spectacle est un cadeau jubilatoire à savoir savourer.
Sur la scène, une servante est allumée. Une chaise pliante, une table, sur laquelle sont posés un gros cahier et une paire de lunettes. Au fond de la salle, Christine Murillo apparait, un carton à la main. Oh Bon Dieu que je suis contente !
Sous les applaudissements, Pauline Carton descend sur la scène intimiste de la Picola Scala, éteint la servante, s’assied, sort quelques accessoires de son carton, commence à se confier sur sa vie. Elle est née en 1884. Quand viendront ses quinze ans, l’âge du corset qu’elle refuse, sa mère lui dira « Ma fille, prend tes responsabilités ». Pauline Carton va les prendre. Elle sera actrice, spécialisée dans les rôles ancillaires, au théâtre, au cinéma, muet, puis parlant. Elle sera chanteuse. Avec un humour caustique bourré d’autodérision, elle parcourt le cahier de ses mémoires, chaque page est le prétexte à des divagations, des anecdotes savoureuses. Nous voilà tout à tour sur le tournage de son premier film parlant, en compagnie de Marcel L’Herbier, aux côtés de Sacha Guitry, on le croisera plusieurs fois. Voici l’amour de sa vie, Jean Violette, poète genevois marié, chaque année ils passent le mois d’août ensemble. Les Palétuviers, bien sûr. Voilà Michel Simon, pour un duo, Danièle Gilbert, au sommet de sa Duducherie pour une interview d’anthologie. Puis Pauline Carton rallumera la servante, s’éclipsera.
Christine Murillo est merveilleuse dans ce spectacle. Elle crée une Pauline Carton attentive, bougonne, râleuse. Avec son visage élastique, elle donne vie à chacun des personnages, elle joue avec talent le franc parler, les divagations, les lapsus, les trous, elle chante, a capella, les airs crus de l’époque où ni la radio ni le cinéma n’existaient.
Pauline Carton est un peu oubliée, maintenant. Si un poète qui n’écrit plus reste un poète, un acteur qui ne joue plus n’est plus un acteur. Au delà de la vie de Pauline Carton, c’est un spectacle sur la transmission, sur le théâtre qui est éternel, sur les emplois qui passent de l’une à l’autre, on se souviendra que, comme Pauline Carton, Christine Murillo a occupé des emplois ancillaires, que quand le théâtre s’est vidé, c’est la servante, une ampoule sur un pied haut, qui veille. Une présence bienveillante, qui se perpétue.
Avec Pauline & Carton, Christine Murillo fait au public un beau cadeau, jubilatoire. Un bonbon, à savourer. On sent le plaisir qu’elle a à être sur scène, à donner vie, d’une façon très juste, à Pauline Carton et à ses amis. On suit la mise en perspective, les indices. On partage la joie qui transpire. Quand elle remontera l’escalier, appuyée sur sa canne, le public la remerciera avec enthousiasme. Et laissera la servante veiller.
A l’Artistic Théâtre jusqu’au 27/04/25
Mardi : 20h45; mercredi : 19h30; jeudi : 20h45; vendredi : 19h00; samedi : 15h00; dimanche : 17h00
Durée : 1h00
Adaptation : Virginie Berling, Christine Murillo, Charles Tordjman
Avec : Christine Murillo
Mise en scène : Charles Tordjman
Visuel : DR
Cette chronique a été publiée pour la première fois sur www.jenaiquunevie.com
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