J’ai saigné

J’ai saigné aux Plateaux Sauvages : Jean-Yves Ruf, accompagné pour la mise en scène par Jean-Christophe Cochard, une vision humble du texte plein d’humanité de Blaise Cendrars, une représentation dont le spectateur ne sort pas indemne.

Sur la scène, un lit, deux chaises, des tons beiges. Champagne, 1915. C’était au lendemain de l’offensive ratée. Blaise Cendras vient d’être amputé de son bras droit.

Dans l’urgence, nu sur son brancard, il est évacué en ambulance. A la gare de Chalons, on ne l’embarque pas dans le train vers Biarritz, il est emmené à l’évêché, transformé en hôpital de guerre. Là, il rencontre Madame Adrienne, une famille d’officiers, elle est au front quand son mari est dans les bureaux. Infirmière, elle l’impressionne par son engagement. Elle va lui demander de partager la chambre d’un petit berger des Landes, 72 éclats d’obus dans le corps, de lui raconter des histoires, tenir son moral, alimenter son imaginaire. Avec succès. Jusqu’à ce qu’un Inspecteur Général change la donne.

De Blaise Cendrars, on voit souvent La Prose du Transsibérien. J’ai saigné, c’est autre chose.

C’est un texte. Un texte imagé, qui parle de souffrance, avec des mots forts, précis, qui portent. Qui parle d’humanité. On croise des gens, des gens qui sont des êtres humains définis par leurs traits d’humanité. La générosité. L’étonnement. La volonté de survivre. La colère. La bêtise. Avec ces moments de légèreté que la vie sait trouver au milieu du chaos. Sœur Philomène.

Des mots qui portent. Ils ne vont pas chercher la pitié du spectateur, ils ne jugent pas. A lui de ressentir, de tirer ses conclusions.

La mise en scène de Jean-Christophe Cochard et Jean-Yves Ruf. Modeste, humble. Des tableaux successifs, tous justifiés, au seul service des mots.

Jean-Yves Ruf, seul en scène. A l’image de la mise en scène, il sert le texte, sans jamais chercher l’effet facile. Avec une pointe d’accent suisse qui laisse traîne le temps, laisse aux mots le temps de porter, au spectateur le soin de construire son image,

La salle a longuement applaudi Jean-Yves Ruf, a pris le temps de sortir de la salle, à l’issue de ce beau spectacle dont nul ne sort indemne.

Aux Plateaux Sauvages jusqu’au 11/12/21
Du lundi au vendredi : 19h00 – samedi : 16h00

Texte : Blaise Cendrars
Avec : Jean-Yves Ruf
Mise en scène : Jean-Christophe Cochard et Jean-Yves Ruf

Visuel : Pauline Le Goff

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