Bohème, notre jeunesse

Avec Bohème, notre jeunesse, l’ambition de l’Opéra Comique et de Pauline Bureau est de rendre l’opéra de Puccini accessible aux jeunes et aux curieux, mobile, compréhensible. C’est une réussite.

Bohème, notre jeunesse revisite l’opéra de Puccini. L’histoire, les personnages essentiels sont là. On y retrouve Mimi, montée de province. Rodolphe et Marcel, l’un est poète, l’autre est peintre, les deux sont sans un sou. Schaunard et Colline, leurs amis tout aussi désargentés que généreux. Musette, fatale et amoureuse. Ils vivent, rêvent de succès. Dépensent en joyeux fêtards le moindre argent gagné. Ils sont jaloux. Ils s’enflamment. Ils s’aiment. C’était vrai en 1889, c’est toujours vrai de nos jours. C’est comme ça quand on a vingt ans.

J’ai une appétence particulière pour les projets qui revisitent les monuments du passé, les adaptent, les mettent au goût du jour, sans s’attacher au respect attentif de la moindre virgule, ni faire de la performance technique un objectif et non un moyen. Quand c’est bien fait, celui qui ne connait pas le texte original rentre plus facilement dans l’histoire, celui qui le connait en détail se laisse surprendre à la redécouvrir sous un autre angle.

J’ai donc apprécié cette version presque intimiste, rythmée, plus courte, dans une langue actuelle qui soutient l’attention du spectateur, avec un parti pris qui rééquilibre la place des hommes et des femmes. Je me suis laissé embarquer par la sensibilité diaphane de Sandrine Buendia, par la force fatale de Marie-Eve Munger, par le côté un peu perdu de Kevin Amiel. L’une ose vivre ses envies, l’autre hésite, ce sont bien elles qui donnent son sens à l’action.

J’ai aimé la souplesse et l’animation du décor, la projection évite les entractes, les changements de décors. Les cheminées fument, les étoiles crépitent, la Tour Eiffel grandit. La ville, elle aussi, vit. Les enseignes ? des néons qui clignotent, un clin d’œil qui rappelle que la bohème intemporelle. Comme le font les costumes, presque plus vintage que d’époque. Dans la fosse, treize musiciens, pour une partition épurée elle aussi, qui voit disparaitre la vingtaine de violons, apparaitre un accordéon.

J’en reviens à l’ambition du projet, un opéra accessible et compréhensible. Je ne suis pas capable d’avoir une opinion sur l’attaque d’un violon, sur la tenue d’une note. Je crois que lors d’une représentation, la technique s’efface, que l’essentiel est la transmission de l’intention, le partage de la sensibilité. De ce point de vue là aussi, Bohème, ma jeunesse est une belle réussite.

Une réussite que le public a longuement et chaleureusement applaudi.

Baroudeur m’avait accompagné, il n’est pas encore un adolescent, il découvrait l’opéra. Attentif du début à la fin, il me serrait la main et posait sa tête contre mon bras quand l’histoire se faisait trop poignante. A la sortie, il trouvait que l’histoire était très émouvante, mais très triste, surtout à la fin. Il m’a parlé des sensations qu’il avait éprouvées, du fait que la musique et les chants l’avaient aidé à bien ressentir la pièce. Ce matin ? Il m’a confié que l’amour c’est compliqué mais c’est bien quand il y en a beaucoup.

Opéra comique les 9-11-13-15-17 juillet et en tournée

D’après Giacomo Puccini – Adaptation musicale : Marc-Olivier Dupin
Direction musicale : Alexandra Cravero
Adaptation, traduction et mise en scène : Pauline Bureau
Avec : Sandrine Buendia, Kevin Amiel, Marie-Eve Munger, Jean-Christophe Lanièce, Nicolas Legoux, Ronan Debois, Benjamin Alunni, Anthony Roullier
Orchestre : Les Frivolités Parisiennes

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