Les troisièmes lundis du Dr Dory – Théâtre de Nesle

Les troisièmes lundis du Dr Dory, c’est un spectacle qui a une âme, l’occasion de reprendre une profonde respiration avant de continuer à porter l’horrible fardeau du temps. Une réflexion autour de la passion éperdue, plus philosophique et moins légère qu’il n’y parait au premier abord.

Dory

Quand Cyril Dory est entré sur scène, je suis resté perplexe. Les yeux maquillés de noir, un peignoir rouge, un visage poupin, j’ai eu l’impression de voir arriver Elton John un peu perdu venir interpréter dans mon salon une chanson de Jean-Jacques Goldman. Je me suis calé sur mon fauteuil.

Et puis la mayonnaise a pris. Dès le début du second morceau. Dr Dory venait d’expliquer que dans toute chanson, il y a une question. Une question qui n’a souvent pas sa réponse dans la chanson. Une question qui n’est pas le thème principal de la chanson. « Pourquoi je saigne, mais pas toi » ?

A travers les années, à travers les genres, à travers les anecdotes de la vie de leurs interprètes, Dr Dory convoque Marie-Paule Belle, Nicole Croisille, Véronique Sanson, Barbara… Avec un air émerveillé d’être sur scène, il suit son fil, déroule son propos.

L’amour, l’amour passion, celui pour lequel on tombe, celui qui fait que Véronique Sanson va quitter Michel Berger en un instant pour traverser l’Atlantique et rejoindre Stephen Stills pendant que Michel Berger vient de réaliser son album Amoureuse, écoutons le titre maintenant, écoutons les paroles avec attention, son compagnon est en train de mixer ce titre… qui décrit son état, elle ne parle pas de lui. Horrible, non ?

Alors Dr Dory convoque Baudelaire, Enivrez-vous. Il convoque le français d’il y a bien des années, tomber éperdument amoureux, de éperdre, égarer, sortir du droit chemin (perdre son sang froid, être bouleversé chez Chrétien de Troyes)

Dr Dory a raison, Baudelaire a raison, il faut s’enivrer, s’enivrer sans trêve, pour ne pas sentir l’horrible fardeau du temps, celui qui, Barbara a passé sa vie à le chanter, n’a qu’une issue. S’enivrer de quoi ? A votre guise ! Il a raison, ce blog s’appelle je n’ai qu’une vie, la fin de la phrase est « je n’ai qu’une vie, et si je ne la vis pas, personne ne la vivra à ma place », il a raison, il faut savourer la vie au delà de la raison, au delà du droit chemin. S’enivrer, mais de quoi ? Ce sera le thème de la prochaine consultation du Dr Dory, je sens que j’irai chercher sa réponse.

La mayonnaise a pris, donc, a donné une âme à ce spectacle pour passionnés. Le producteur en moi voyait quelques améliorations techniques, regrettait l’absence d’une basse pour soutenir le piano, au fond, ce n’est pas important de revenir sur le droit chemin, l’alchimie du spectacle tient aussi de ces détails, de voir Dr Dory s’enivrer d’être là, de voir Cyril Dory, sincère et généreux, mettre les habits du Dr Dory pour partager avec nous sa passion, sa réflexion, sa réflexion sur la passion.

La réflexion continue, le fardeau du temps, la disparition d’Eglantine, The show must go on. Et la solitudine de celui qui reste.

Baroudeur était là, attentif, je suis content qu’il ait pu entendre ce message. Somnolant sur la fin, il a explosé de rire à l’évocation de Karamel, mais ça, ça restera notre secret.

Les troisièmes lundis du Dr Dory est un spectacle imparfait mais chaud, un spectacle qui a une âme, un spectacle qui réchauffe le cœur, un spectacle qui réfléchit. Un spectacle qui fait du bien.

Un spectacle unique, chaque représentation va poursuivre le fil de cette réflexion, est-ce qu’il va se créer un club des spectateurs fidèles ? Je crois que j’ai envie de le savoir.

Au théâtre de Nesle les 15/01/18 – 19/02/18 – 19/03/18 – 16/04/18 – 21/05/18 – 21h00

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