Je n'ai qu'une vie – Des émotions à partager

Sur la scène, une grande cour pavée. On aperçoit une serre, des sacs de sable, des tréteaux, des grands panneaux, d’autres choses encore. On va commencer. Je vous présente Jean.

L’apocalypse zombie a eu lieu, nous, le public, avons été accueillis dans un refuge, et le comité qui le dirige nous réunit. Se planquer, oui; bosser, non ? Ça ne va pas le faire, surtout quand on vise l’autosuffisance. Alors il y a des taches à répartir. Dans le comité, il y a Charles, le chef; Marie, qui organise; Jean, qui fait; Chantal, qui écoute et soutient; Sam-et-Rémi, ils surveillent et sont en retard. Les palissades ne sont pas infranchissables, un zombie s’approche de Sam-et-Rémi. Pas de massacre à l’horizon, mais le partage d’une Francfort grillée au barbecue. La peur évanouie, les groupes peuvent s’assembler. Sans se rassembler. Les zombies travaillent dur à la reconstruction, la masse des vivants vit silencieusement, le comité dirige. Jusqu’au jour où Clairvus, le premier zombie à s’être approché, intègre le comité et la vie de Marie. Les zombies et les vivant pourraient donc vivre dans une communauté unique ?

La masse silencieuse, la caste des travailleurs de force, une classe dirigeante. Les Méritants posent son regard social sur le fonctionnement des organisations humaines, celle qui se met en place quelque soit la taille du groupe. Association, pays, planète. Lisez les gazettes. Voilà bientôt la bienpensance qui se met en place, avec son jargon sociologique et ses mots qui croient masquer les différences. Plus de zombies ni de vivants, des méritants qui, avec le travail, peuvent grimper l’escalier social, prendre l’ascenseur social. Les experts et les spécialistes peuvent venir débattre, jusqu’au moment où les zombies tireront les conséquences de la situation.

Julien Guyomard est un malin, aucun d’entre nous n’est réellement concerné par une apocalypse zombie. Son texte sort donc son scalpel entomologique, et dissèque en deux heures le fonctionnement d’une société, de toutes les sociétés. On peut tranquillement savourer, il ne parle pas de nous, de notre communauté, mais d’une hypothétique société post apocalyptique. Heureusement, notre société ne s’effondre pas, elle ne connait pas les classes ni les castes, et son fonctionnement est parfaitement fluide. Comme les livres de Jared Diamond, où on s’intéresse à un autre lieu dans un autre temps.

Si vous vous attendez à un n-ième avatar des Walking Deads, vous serez déçus, de toutes façons le sanguinolent marche rarement au théâtre. Si par contre vous vous intéressez au fonctionnement des communautés, vous verrez Les Méritants avec attention, plaisir, sans grand espoir.

Baroudeur était là. Venu pour les zombies, il s’est amusé, il s’est finalement étonné de retrouver le fonctionnement de sa classe au collège.

Au Théâtre de La Tempête jusqu’au 22/10/23
Du mardi au samedi : 20h30; dimanche : 16h30
Durée : 2h00

Texte : Julien Guyomard
Avec : Xavier Berlioz, Julien Cigana, Sol Espeche, Magaly Godenaire, Damien Houssier, Renaud Triffault, Élodie Vom Hofe
Mise en scène : Julien Guyomard

Visuel : Néjib

Cette chronique a été publiée pour la première fois sur www.jenaiquunevie.com