Un dernier rêve pour la route – Théâtre du Rond Point -> 24/06/23 : un spectacle intelligent et esthétique dont on finit par comprendre l’horreur

Un dernier rêve pour la route au Rond Point : un texte intelligent, une mise en scène esthétique, une belle distribution. Une femme enfermée entre les griffes de sa mère et le regard des hommes. Un thème fort, dont l’horreur se révèle petit à petit.

Sur la scène, un lit, entre une armoire et un rocking chair. Un grand lit, 8 oreillers. On entend la chanson de Nazaré Pereira. Jogo d’Amarelinha. Voilà Philippe Eveno, à la guitare. Christiane Cohendy, qui chante. Le jeu de la Marelle va de la terre jusqu’au ciel… Helena Noguerra est allongée. Pierre Notte surgit de sous les draps.

C’est l’histoire d’une jeune femme, Iléna, et de sa mère. Une carne, cette mère. De ces maitresses femmes qui enfant ont vécu la première guerre mondiale, qui jeune femme ont tenu la cellule familiale pendant la seconde. Rien ne les touche vraiment, et certainement pas la décision de sa fille d’en finir avec la vie.

Pendant ses derniers moments, Iléna rêve. Quatre fois. Quatre histoires d’amour déglinguées. Quatre histoires où elle voudrait être elle, et non jaugée par les autres, les hommes, sa mère. Tous ces regards dont elle ne peut se défaire. Il y a un peu d’Eurydice dans Iélena.

Le texte d’Helena Noguerra est un texte intelligent, on y cherche allusions, jeux de mots, calembours, on pouffe quand on les trouve. La mise en scène de Catherine Schaub, appuyée sur une scénographie d’Emmanuel Clolus et des lumières de Thierry Morin, est très esthétique, très léchée. On sent le plaisir de la distribution à être sur scène. Romain Brau, Christiane Cohendy, Philippe Eveno, Helena Noguerra, Pierre Notte, ils sont tous bons, chacun pousse le curseur du caractère de son / ses personnages.

J’ai vécu la représentation dans cette intelligence esthétique, comme un dernier spectacle donné par des amis pour saluer Jean-Michel Ribes, pour rappeler ce qu’est le théâtre qu’il a défendu pendant ses vingt années à la tête du Rond Point. La nuit passée dessus, c’est le côté dur, atroce de la pièce qui en reste. L’histoire de cette jeune femme enserrée entre les mandibules de sa mère et le regard des hommes, que personne ne peut sauver, que personne ne veut sauver, et surtout pas sa mère, la première à la juger.

Un dessin d’enfant, au fond. Une ligne claire, des à plats de couleurs vives. Dont on sourit quand on jette un œil rapide, qui vous glace le sang quand on comprend les horreurs que vit l’enfant, face auxquelles même la magie est impuissante.

Au Rond Point jusqu’au 24/06/23
Du mardi au samedi : 20h30; dimanche : 15h30
Durée : 1h20

Texte : Helena Noguerra
Mise en scène : Catherine Schaub
Avec : Romain Brau, Christiane Cohendy, Philippe Eveno, Helena Noguerra, Pierre Notte

Visuel : Stéphane Trapier

Cette chronique a été publiée pour la première fois sur www.jenaiquunevie.com

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