Toute une vie sans se voir – Studio Hébertot : les cartes postales de Véronique Sanson et Michel Berger – Succès/Reprise

Toute une vie sans se voir reprend au Studio Hébertot : à travers les messages musicaux qu’ils se sont envoyés après leur rupture, Julie Rousseau et Bastien Lucas mettent en perspective le mythe d’Orphée et Eurydice, les blessures de Michel Berger, les remords de Véronique Sanson. C’est superbe.

Sur la scène, deux pianos. Julie Rousseau / Véronique Sanson entre, énervée, entame une première chanson, Quelquefois je sens les mystères... Le temps est assassin. Commence à se confier. J’veux plus d’amour… Elle est rejointe par Bastien Lucas / Michel Berger vêtu d’un pull jacquard délicieusement daté.

L’anecdote est connue. Un jour, Véronique Sanson a quitté Michel Berger, prétextant aller acheter des cigarettes, elle a rejoint Stephen Stills à New York. L’un a le cœur brisé, l’autre éprouve des remords quant à la brutalité d’un départ qu’elle ne regrette pas. Les deux ne cesseront de s’envoyer des cartes postales l’un à l’autre, à travers leur musique, leurs chansons. Avec beaucoup de sensibilité, Julie Rousseau et Bastien Lucas se sont saisis de cette histoire, ils l’ont mise en miroir du mythe d’Orphée et d’Eurydice, c’est Michel Berger qui est enfermé aux enfers.

Ils tournent autour de leurs deux pianos, ils chantent, parfois seuls, parfois ensemble. Quelques hits, bien sûr, d’autres chansons moins connues, parfois seulement quelques lignes. Les voix se mêlent, les arrangements s’échangent. Ils content le mythe, aussi. Michel Berger, abandonné, l’homme blessé, qui n’oublie pas. Véronique Sanson, la femme libre, rebelle, amoureuse, qui aurait voulu que les choses se passent différemment, qui finit par se pardonner. Blessures, souffrances, le terreau des belles chansons.

Mis en scène par Stéphane Olivié-Bisson et une lumière très travaillée, avec un travail à la régie qui permet au spectateur de saisir chacun des mots, de ressentir chacun des messages, le spectacle trace son sillon, déborde, c’est un plaisir que d’y assister.

Julie Rousseau, Bastien Lucas. Ils sont formidables, tous les deux. Ils interprètent deux amoureux des années 1970, on reconnait les intentions, les intonations, sans jamais verser dans l’imitation. Ils sont habités par l’histoire, ils la portent, on peut toucher leur émotion. Quand ils chantent en duo, la magie du spectacle et le plaisir du spectateur sont multipliés.

J’ai ressenti un immense plaisir à suivre leur histoire, à sentir leurs émotions se construire, à sentir mes poils se dresser sur certains duos (Ah, Seras-tu là !). Ce n’est pas le récital nostalgique d’une ancienne légende, c’est un merveilleux dialogue chanté qu’on suit avec immense plaisir, et que le public a salué d’applaudissements unanimes et enthousiastes.

Reprise au Studio Hébertot jusqu’au 07/04/23
Jeudi, vendredi, samedi : 19h00; dimanche : 17h00
Durée : 1h15

Texte : Julie Rousseau et Bastien Lucas
Avec : Julie Rousseau, Bastien Lucas
Mise en scène : Stéphane Olivié-Bisson

Visuel : DR

Cette chronique a été publiée pour la première fois sur www.jenaiquunevie.com

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